Le
dernier Empereur, Bao Daï
Quelques
dates :
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né le 22 octobre 1913, décédé le 31 juillet 1997,
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intronisé le 8 janvier 1926, à l'age de 12 ans,
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Retour dans son pays en Septembre 1932,
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épouse en 1934 Nam Phuong,
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11 mars 1945, donne lecture d'un acte d'indépendance du Tonkin et de l'Annam ;
Le 14 avril, il annonce l'annexion de la Cochinchine. C'est la réunification du
Vietnam.
Extraits
Éducation
"Tous les jours mon précepteur, un mandarin lettré
venait m'enseigner, à travers les entretiens de Confucius, les devoirs et
charges du Prince. Pendant 4 ans, j'ai ainsi vécu seul, prenant mes repas seul,
au rythme d'un programme immuable ou chaque journée était identique à la précédente.
Une à deux fois par mois, j'étais autorisé à assister
à repas que prenait mon père [l'empereur Khai Dinh]. Plus rarement, alors
qu'il se rendait à la Résidence Supérieure, il m'emmenait avec lui. J'avais
le loisir de m'amuser avec les enfants du Résident Pasquier, qui parlaient
couramment la langue vietnamienne.
Pendant cette période, je n'ai jamais eu de jouet."
Le Prince Héritier sur le trône |
"D'ailleurs, contempler la nature, ainsi que je le faisais
tous les jours, c'est jouer avec l'univers tout entier. Comme mes études, mes
jeux étaient graves, emprunts de respects pour l'ordre établi.
Parfois, à l'occasion d'anniversaires, je pouvais me
rendre au palais des reines, situé de l'autre coté que celui de l'empereur, et
bordé" d'un mur aveugle. Chaque épouse royale y disposait d'un
appartement royal. L'impératrice douairière y occupait la 1ere place. Dans ces
occasions, j'allais la saluer suivant un cérémonial très strict, ne lui
parlant qu'a genoux, alors qu'elle se tenait quasiment invisible derrière un
rideau de fin bambous. Le palais des femmes comptait encore quelques eunuques,
et de nombreuses servantes, chaque épouse royale disposant d'un nombre de
domestique proportionnel au rang qui lui était attribué. Ces servantes me préparaient
de somptueuses collations qui faisaient diversions dans la nourriture assez
spartiate que l'on me servait tous les jours. [..]
Certes, ce régime d'ou tous les exercices physiques étaient
proscrits, n'était guère sain pour un jeune enfant. Il explique d'ailleurs à
lui seul la mortalité précoce d'un grand nombre de princes. Mon grand père
est mort à 25 ans, son frère à 14 ans. A 9 ans, je pesais à peine plus de 20
kilos."
Intronisation
"Un soir de novembre 1925, M. Charles m'attend à la
sortie des cours.
Mon cher Vinh, j'ai une nouvelle bien triste à vous
annoncer. L'empereur Khai Dinh est mort avant hier [25 novembre 1925]. Vous allez partir pour assurer la
succession de votre père. [..]
J'avais 12 ans.
L'Empereur Khai Dinh au travail |
"Nous arrivons à Hué à la fin du mois de décembre. Mon caractère
s'est affermi mais je suis préoccupé par la succession. Avant de mourir, mon père
a exprimé sa volonté de me voir poursuivre mes études en Europe. Les autorités
française consultés par la cours de hué ont donné leur accord. Le Conseil d'État
ou secret a donc nommé un régent qui exercera le pouvoir jusqu'à mon retour.
[..]
Quelques jours après que furent prises ces dispositions,
le 8 janvier 1926, à la date fixée par les astrologues comme la plus favorable
ont lieu mon couronnement.
La veille, je me suis rendu dans le palais de Can Chanh,
pour y recevoir les ornements royaux. On m'a revêtu de la propre tenue de
l'Empereur Gia Long, fondateur de notre dynastie. Cette tenue est précieusement
conservé comme une relique et ne sert que pour les cérémonies de
couronnement. Tunique jaune, décorée de broderie d'or, avec les bottes
assortis, chaussures en forme de cothurnes à semelle épaisse dont la pointe se
relève, puis la coiffure, sorte de tiare à fonds de crin, ornée de broderie
et de pierres précieuses.
L'un des 4 membres du Comat m'a alors remis la plaque d'or,
"ordre royal", qui est accroché au coté droit de la tunique, un très
haut mandarin m'a présenté, de la part de la Cour, le Livre d'Or, ouvert au
commencement de chaque règne, sur lequel sera inscrit le nom que je porterai
dorénavant : Bao Dai, qui signifie "le protecteur de la grandeur"."
Le sceau de Bao Dai (en 1950) |
Retour en Annam
Quelques années plus tard, en 1932, Bao Dai
rentre dans son
pays. Il se pose alors la question de son rôle :
"Quels seront mes prérogatives ?
Après la mort de Khai Dinh en 1926, une convention a été
passée avec la France, à la suite de laquelle le conseil se plaça sous la
présidence du Résident Supérieur, à qui nous rendons compte et présentons
nos propositions". Les décisions sont prises par le Résident Supérieur
et son cabinet, en particulier pour tout ce qui concerne le budget.
- personne ne m'a jamais parlé de cette convention. Si
j'avais été mis au courant, je ne l'aurai jamais acceptée.
- Sire, elle a été signée par le Conseil de Régence.
Pratiquement, elle a transféré au Résident Supérieur les dernières
attributions du Gouvernement Impérial aux plans politiques et judiciaires. Pour
le Tonkin, c'est la Résident Supérieur du Tonkin qui exerce désormais les
prérogatives de vice roi."
Voyage organisé au Tonkin
Il a alors 19 ans. Un voyage est organisé peu après son retour au
Tonkin, pour faire visiter à l'Empereur une région qu'il n'a jamais vue. Des
réceptions sont organisées à Hanoi. Visite des mines de Hon gai.
"Pour moi, ce sont les français qui me font découvrir
mon pays et, au cours de ce voyage, je fais un peu figure de vassal de la
France.[..] Ce
voyage m'a incontestablement révélé une nouvelle dimension de mon pays. Les
possibilités industrielles du Tonkin devrait faciliter son accession au rang
des nations modernes. [..] Je n'en reviens pas moins assez déçu de ce séjour.
En effet, j'ai encore mieux ressenti à Hanoi, où j'ai étais reçu en invité
alors que j'étais chez moi,
combien est infime le rôle qu'on attend de moi. Tout ce qui concerne, en
fait, la vie quotidienne, l'avenir de mon pays et de mon peuple m'est interdit.
Je ne suis plus qu'un personnage de théâtre qui apparaît de temps en temps
sur la scène mais qui ne mène pas le jeu."
La cité impériale |
Tentative de réformes
"Le 10 septembre 1932, je fis publier une ordonnance
dans laquelle je déclarais ma volonté de gouverner avec le concours du peuple,
sous la forme d'une monarchie constitutionnelle, et de réformer tout ce qui
avait besoin de l'être : le corps mandarinal, l'enseignement et la justice.
Cette déclaration obtint un très grand succès dans la
population, notamment dans la jeunesse vietnamienne qui attendait un changement.
[...]
L'avenir se présentait sous d'heureux auspices. Je savais
qu'il ne fallait rien brusquer si je ne voulais pas subir le sort de certains de
mes prédécesseurs. [..]
C'était mal connaître l'administration française, ce que
l'on appelait "les services civils". Appuyés par les milieux nationalistes,
ils opposèrent aussitôt une sourde résistance à toutes tentatives de réformes.
Pourtant celles ci étaient indispensables. Il faut savoir qu'à cette époque,
si un Annamite était admis à égalité de titres dans les cadres de
l'Administration, comme les français, il était loin de percevoir le même
traitement. Ainsi, un gouverneur de grande province [...] gagnait moins qu'un
simple agent de police européen engagé à Hanoi. Dans ces conditions, il était
inévitable que pour tenir leur rang et ne pas perdre la face,
certains mandarins fussent pousser à abuser de leur situation auprès du
peuple. [..] Elles avaient aussi une autre conséquence, non moins grave : elles
provoquaient le découragement des meilleurs éléments [..].
Une lutte pied à pied s'engagea pour tenter de reprendre
quelque unes des décisions qui avaient pratiquement vidé le traité de
protectorat de son contenu. L'Administration fut la plus forte, et toute
tentative fut paralysée."
Au bout de quelques mois, les deux proches collaborateurs
engagés par Bao Dai présentèrent leur démission, faute de pouvoir de réformer
quoique ce soit.
Déception confirmée
"Vous m'avez dit que
mon père était revenu très déçu de son voyage en France de 1922.
Maintenant, au bout de 18 mois de présence ici, j'éprouve la même déception.
De ses conversations à Paris, mon
père avait espéré obtenir le retour au régime réel du protectorat. Moi,
j'ai cru pouvoir réaliser des réformes qui auraient abouti au même résultat.
Tout a été vain. J'en arrive à penser que les nationalistes ont raison.[..] Malraux
disait: "il est difficile de concevoir qu'un annamite courageux soit autre
chose qu'un révolutionnaire".
La 2eme guerre mondiale
"Contrairement
à ce qu'on a pu croire, la défaite de la France en juin 1940 n'a pas provoqué
au Vietnam un relâchement des liens qui existaient entre les deux pays. En
réalité, le peuple vietnamien éprouvait une grande compassion à l'égard des
malheurs qui frappaient la nation protectrice et la population n'a peut être
jamais été aussi proche de la Communauté française qu'à cette époque là.
Ainsi, lorsqu'il fut fait appel à elle, répondit elle avec générosité à
toutes les collectes organisées par le Secours National. Sans doute y avait il
dans cette attitude du peuple vietnamien l'espoir que plus tard la France, en
retour, accomplirait un geste en faveur du Vietnam et de son indépendance."
Bai
Dai à l'occasion de la fête du Serment à Ban Me Thuot, en 1950. |
Coup de force des japonais
L'ambassadeur du Japon en Indochine s'entretient, le 9 mars
1945, avec l'Empereur ;
" Le Japon a été contraint de prendre les affaires
en main en Indochine en raison des activités subversives de la résistance française.
Celle ci recevait des armes et avait l'intention de géner les mouvements de
notre armée". L'ambassadeur précise "Nous voulons redonner l'Asie
aux Asiatiques".
Puis l'ambassadeur ajoute :" Je suis chargé de
remettre à votre majesté l'indépendance du Vietnam". [..]
"Puis je donc laisser passer la proposition qui nous
est offerte ? L'indépendance, c'est le rêve de tous les vietnamiens !" En
toute connaissance de cause, je prends ma décision : il faut savoir saisir
l'occasion tout en essayant de réduire au minimum les exigences et les ingérences".
=> l'indépendance est donc proclamée le 12 mars 1945.
A l'issue du cessez le feu des japonais :
"Je suis moi
même profondément ému. L'œuvre que mes ancêtres n'avaient pas pu faire
aboutir, je l'ai conduite à son terme. Le Vietnam est
réunifié et indépendant". Les souffrances endurées par mon peuple n'ont
pas été vaines."
Il écrit à de Gaule :
"Vous avez trop souffert
pendant 4 ans pour ne pas comprendre que le peuple vietnamiens qui a 20 siècles
d'histoire et un passé souvent glorieux ne veut plus, ne peut plus supporter
aucune domination, ni aucune administration étrangère."
Abdication
"Devant
la volonté unanime du peuple
vietnamien prêt à tous les sacrifices pour sauvegarder l'indépendance
nationale, nous prions respectueusement votre majesté de bien vouloir accomplir
un geste historique en remettant ses pouvoirs". Signé : le comité de
patriotes représentant tous les partis et toutes les couches de la population..
Ils veulent
une révolution, je vais la faire mais sans verser le sang, par une évolution
politique. Si l'on tient compte de l'histoire des peuples, il n'y a qu'une seule
solution : mon départ."
Ceux qui
l'ont rédigé sont des patriotes qui veulent comme moi l'indépendance et
l'unité du Vietnam. Il ne aucune idée de qui se cache derrière les
signataires. "Ils ont des contacts, des moyens, des armes ; je n'ai
rien".
Bao Dai est
d'accord pour abdiquer. Mais à qui renvoyer la réponse ? Qui est ce fameux
"comité de patriotes" ? Les conseillers se renseignent, mais
reviennent bredouille. "Alors je lance un message dans le vide, comme
une bouteille à la mer" Par télégraphe, je m'adresse au "Comité
des patriotes" à Hanoi.
"Répondant
à votre appel, je suis prêt à m'effacer. A cette heure décisive de
l'histoire nationale, l'union
signifie la vie, et la division la mort. Je suis prêt à tous les sacrifices
pour que cette union puisse se réaliser et demande aux chefs de votre Comité
de venir le plus tôt possible à Hué pour le transfert des pouvoirs".
"Leur
incontestable succès n'est il pas le signe qu'ils ont reçu mandat du ciel
?".
"Indépendance
pour la patrie, Bonheur pour le peuple. Pour ces 8 mots et pendant 80 ans, tant
de nos frères et de nos sœurs ont sacrifié leur vie dans la jungle, les forêts
et les prisons que, comparer aux sacrifices de ces milliers de héros et d'héroïnes,
mon abdication n'est qu'une très petite chose."
"Enfin
libre !"
"Maintenant,
il fait que le peuple se serre les coudes autour d'une équipe apparemment plus
capable que moi de réaliser l'indépendance."
Quelques heures
après, suite à la déclaration d'indépendance du Vietminh, il déclare "Cette
proclamation comporte un réquisitoire contre le colonialisme française dont la
violence me surprend ..."
Le 31 juillet 1997, le dernier Empereur du Vietnam meurt à Paris. Il est enterré au cimetière de Passy. Il faudra néanmoins attendre le 20 mai 2006, soit presque 10 ans, pour que le dernier Empereur ait droit à un monument funéraire au lieu d'une simple plaque de béton... Voir http://www.lesmanantsduroi.com/articles/article27118.php |
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